Côte d’Ivoire-AIP/ Rétro 2022: Le festival Cavally “Boyé Gôh”, fait marquant de l’année à Guiglo (Feature)
Le festival «Boyé Gôh» des arts et de la culture Wê a été de loin le fait artistique, culturel majeur marquant de l’année 2022, dans la région du Cavally (Ouest ivoirien), organisé par le conseil régional, du jeudi 10 novembre au samedi 19 novembre 2022, à Guiglo, la capitale régionale. Un festival qui, le temps d’une semaine festive, artistique, culturelle, gastronomique et économique, a été le creuset du vivre ensemble si cher au président de la République, Alassane Ouattara, vu les nombreux festivaliers férus de la chose artistique et culturelle, qui ont convergé des quatre coins de la Côte d’Ivoire, à Guiglo, pour festoyer avec leurs frères et sœurs du Cavally.
L’honneur avait échu à la présidente du conseil régional, Anne Désirée Ouloto, de donner, le jeudi 10 novembre, le top départ des festivités de la première édition du festival Cavally «Boyé Gôh» des arts et de la culture Wê, placé sous le thème, «Arts et culture au service de la paix et du développement», pour faire découvrir et faire la promotion de la culture Wê, et dont les temps forts mettaient en exergue l’importance de la sauvegarde de la culture Wê. Mme Ouloto s’était alors réjouie d’offrir aux populations, grâce aux contributions financières de ses collègues ministres, cette «belle» tribune qui, durant plus d’une semaine, participât à la dimension sociale et culturelle de Guiglo.
L’initiatrice de ce festival avait, à juste titre, tenu à souligner que son rêve était devenu une réalité de voir le Cavally être une région rayonnante, d’y avoir un festival qui va créer des conditions d’ouverture, de valorisation et de promotion des réalités traditionnelles, culturelles, sociales, écologiques et environnementales locales. Tout en se disant heureuse de l’organisation de cet événement culturel qui, au-delà des valeurs qu’il enseigne, s’avère le creuset de l’existence de ce peuple forestier, représentant également son identité sociologique ancestrale, tout en inculquant des valeurs sociales de paix, d’humanisme, de solidarité, de vivre ensemble, de pardon, d’humilité, de courage et de loyauté qui caractérisent le peuple Wê.
Selon elle, riche de son patrimoine matériel et immatériel, source d’épanouissement et de richesse, pour un bien-être commun, à travers les us et coutumes, danses, chants, contes, jeux divers, et les communications expressives et gestuelles, le pays Wê s’est caractérisé par son altruisme, sa diversité culturelle, touristique et artistique. Et que terres d’abondance et de brassage des peuples, les régions Wê (Cavally et Guémon) ont été, durant des décennies, le reflet d’une Côte d’Ivoire paisible et prospère. S’enrichissant de l’expérience des autres et se consolidant dans une cohabitation fructueuse et harmonieuse.
Elle avait, cependant, regretté que, malheureusement, des crises socio-politiques à répétition ont durement fragilisé le tissu social et ont fortement contribué à la dévalorisation de la culture Wê, par la désacralisation des fondements de la société Wê. Toute chose qui fait qu’aujourd’hui, les jeunes Wê se sont détournés progressivement de leur culture avec une défiance totale aux pratiques et principes coutumiers, et une désobéissance accrue aux règles sociales autrefois observées avec dévouement (…) Et d’ajouter : « les plus jeunes enfants ne connaissent pas la culture Wê, le brassage ayant fait que le maniement de la langue Wê, la connaissance des pratiques culturelles sont très souvent loin de l’éducation parentale, mais qu’il se crée, désormais, à travers ce festival, un rendez-vous annuel des Wê, d’avec leurs frères et sœurs qui vivent dans leur région.
Appel à la sauvegarde du patrimoine culturel Wê
Le commissaire général du festival, Félix Déhé Lekpahi, en avait appelé au peuple Wê, à tout faire pour sauvegarder son «riche» patrimoine culturel et artistique, malgré les aléas de la mondialisation. D’autant que, à l’en croire, les références originelles qui justifient l’existence historique et sociologique de ce peuple souffrent de l’étouffement des civilisations occidentales, un mal soutenu par l’évangélisation tous azimuts. «Si la mondialisation s’impose à nous, au moins une prise de conscience doit nous animer, en vue de sauvegarder nos acquis culturels», avait-il affirmé, en soutenant que ce projet incombe à tous les Wê des régions du Cavally (Guiglo), et du Guémon (Duékoué).
Encouragement à un retour aux valeurs culturelles Wê
Un fils de la région, Dr Norbert Siokiuwon, panéliste, décortiquant le thème sur «La performance linguistique comme la porte d’accès à l’âme culturelle des peuples de l’oralité, l’exemple du peuple Wê», avait, lui aussi, encouragé le peuple Wê et les autres peuples de Côte d’Ivoire et d’Afrique à revenir à leurs valeurs culturelles par la langue, en évitant de se laisser entraîner les yeux fermés par la mondialisation.
«On perd les repères, les enfants, la nouvelle génération n’a plus de repère. S’il n’y a plus de contes, de chants, d’éléments classiques pour éduquer, il n’y a pas de repère linguistique. Or, il faut que la langue reste une performance pour qu’il naisse l’accès à la culture », avait-t-il signifié.
Le masque Gla, envoyé par Dieu pour résoudre le problème de la mort des humains
Un chercheur traditionnel étudiant la pratique du Gla (masque Wê), Michel Nonhon, chef canton Doo, avait expliqué que le Gla, intermédiaire entre l’homme et Dieu, a été rendu immortel par le Tout puissant pour résoudre le problème de la mort des humains sur la terre, lors d’une conférence publique sur le thème, «Le Gla, l’art vivant de la spiritualité Wê». A ce titre, se déclarant celui qui étudie la pratique du Gla, et qui fait des recherches sur ce masque, il avait souligné que le Gla appelé Nan Tabali, l’ancêtre, ou Gnonkpo, le «vieux, est l’intermédiaire entre l’homme et Dieu, qui l’a rendu immortel pour résoudre le problème du départ de l’homme dans l’au-délà.
Selon lui, des gens pensent que les religions importées sont celles qu’il faut suivre. Or, toujours selon lui, lorsque Dieu a créé le monde, il a envoyé des intermédiaires sur tous les continents par lesquels les hommes doivent passer pour le vénérer. Notamment chez les Arabes, dans l’Islam, Mahomet, chez les Wê et Africains, les Kouis, qui ont investi le Gla, ce qui permet d’affirmer qu’il est une religion.
Clap de fin et un menu alléchant
Les lampions s’étaient éteints sur la première édition de « Boyé Gôh», le samedi 19 novembre, par une cérémonie officielle solennelle à la place publique Félix Houphouët-Boigny de Guiglo, en présence des ministres de la Fonction publique, Anne Désirée Ouloto (l’initiatrice), de l’Intérieur et de la Sécurité, Vagondo Diomandé, du Tourisme, Siandou Fofana, du ministre, Gouverneur du district des Montagnes, Albert Flindé, et de la représentante du président du conseil économique, social, environnemental et culturel (CESEC), Diakité Coty Fatouma, épouse Kanaté.
«Quel beau jour! Oui! Boyé Gôh est un festival de bonheur, et le Cavally renaît de ses cendres, rayonne aujourd’hui. Dans le Cavally, il fait tout simplement bon vivre», s’était exclamée la ministre Ouloto, «fière que le festival ait constitué au niveau sociologique et historique, un cadre de découverte culturelle, de dialogue, de retrouvailles, de partage de valeurs et de spiritualité entre les Wê, et entre eux et les autres peuples frères qu’ils accueillent dans leurs régions.» Et qu’il ait aussi permis, «au niveau économique et académique, de revisiter tous les aspects de la culture locale. Elle avait de ce fait invité les siens à faire tout pour, main dans la main, “préserver et transmettre aux enfants ce dont nous avons gratuitement hérité de nos ascendants. Lesquels ont, jadis, s’appuyant sur l’humanisme, l’intelligence et la sagesse, su gouverner dans l’esprit de la République.”
L’intérêt du président du CESEC à la promotion des valeurs culturelles ivoiriennes
La représentante du président du conseil économique, social, environnemental et culturel (CESEC), la vice-présidente Diakité Coty Fatoumata, épouse Kanaté, avait, au nom de son mandant, indiqué que Dr Aka Aouélé accordait un intérêt particulier à tout ce qui a trait à la promotion des valeurs artistiques et culturelles et à la valorisation des patrimoines culturels hérités des riches traditions ivoiriennes, et contribuant à un réel développement inclusif et partagé des régions du pays.
«Ce moment de communion fraternelle que vous avez initié tient à cœur à Dr Aouélé, qui vous félicite pour le souci constant qui vous habite de magnifier nos coutumes, de les porter au grand jour, de montrer ce que le peuple Wê porte comme valeurs ancestrales et qui détermine toute son existence», avait indiqué à l’endroit de l’initiatrice, Mme Diakité, faisant valoir que ce festival témoigne aussi de la détermination de Mme Ouloto à contribuer à Guiglo, et dans toute la région du Cavally, à la cohésion sociale, à la paix, l’entente, au vivre ensemble, à la solidarité conformément à la haute vision du président Alassane Ouattara. Mais encore de la proximité du président du CESEC et de son attachement aux valeurs fédératrices que ne cesse de prôner la ministre Ouloto.
L’engagement d’Anne Ouloto pour la promotion de la culture salué par le ministre du Tourisme
Le ministre du Tourisme, Siandou Fofana, avait, lui, salué, le samedi 19 novembre, l’engagement de sa collègue de la Fonction publique à valoriser les arts et la culture Wê, estimant que l’organisation d’un tel événement renforce la cohésion sociale, accélère le développement et promeut, au plan touristique, la destination Cavally. Tout en lui rendant hommage pour ce qu’elle apporte au tourisme, à travers ce festival qui fait naître sur place une forme d’économie de service, en participant ardemment au développement territorial, envisageant de le labelliser et d’en faire un fonds de commerce du tourisme de «Sublime Côte d’Ivoire».
Une gagnante du concours culinaire, en véritable cheffe étoilée de l’art culinaire du terroir Wê
Parmi une kyrielle d’activités artistiques, culturelles économiques, la gastronomie du terroir Wê, ayant été mise en relief lors du festival, a permis à Dame Estelle Ella Djepa d’être déclarée gagnante du premier prix du concours culinaire par les membres du jury, le samedi 12 novembre. La gagnante, une compétitrice venue du département de Toulépleu, avait reçu en guise de récompense et d’encouragement, un congélateur, une gazinière, un lot de cuvettes, un carton d’huile, cinq complets de pagne et une enveloppe de 200.000 FCFA.
Huit femmes issues des quatre départements de la région à savoir, Guiglo, Taï, Bloléquin et Toulepleu, avaient pris part à ce concours culinaire qui leur imposait de confectionner des mets du terroir, aromatisés de trois sauces typiquement local, dont la sauce graine.
L’annonce choque de la construction d’une Maison des arts et de la culture Wê à Guiglo
La présidente du conseil régional, Anne Désirée Ouloto, pour boucler la boucle, avait annoncé, le jeudi 10 novembre, à l’ouverture du festival, la construction, pour très bientôt, d’une Maison des arts et de la culture Wê, à Guiglo. Elle avait fait savoir que la pose de la première pierre interviendra, très prochainement. «Je vous l’avais promis, c’est chose faite », s’était-elle écriée, parlant de cette maison dont elle estime être la matérialisation d’un rêve, et expliqué qu’à travers cet édifice, les populations auront droit à un espace d’animation culturelle, de recherches, d’apprentissage de la culture Wê, mais aussi un espace de la pratique de la culture et de l’art Wê.
Le ministre du Tourisme, Siandou Fofana, croyant en cette Maison, avait, pour sa part, encouragé tous les acteurs locaux de la culture et des arts à se mettre ensemble et s’impliquer dans la construction de la Maison des arts et de la culture Wê, promettant la contribution de son département ministériel, à travers le fonds de développement touristique. Maison des arts et de la culture Wê, dont la sortie de terre est attendue en 2023, peut-être, un peu plus, par tout un peuple qui est conscient que son existence va booster la destination touristique de Guiglo, voire du Cavally.
Exposition vente d’articles teintés de la culture Wê, notamment les tenues traditionnelles très prisées du terroir, des parades des quatre départements de la région que sont Guiglo, Taï, Bloléquin et Toulepleu, devant les invités venus, notamment d’Abidjan-Adjamé, en montrant tout ce que le Wê a de magnifique surtout dans la manière de se vêtir, entre autres, ont jalonné le festival et la cérémonie officielle de clôture des festivités.
Débutée, le jeudi 10 novembre, la première édition du festival «Boyé Gôh» des arts et de la culture Wê, s’était achevée, le samedi 19 novembre. Plusieurs activités étaient au programme, notamment des activités scientifiques, fresques, jeux traditionnels, dont le Sawyèyè, défilés de mode, prestations de masques, concours culinaire, exposition vente, sensibilisation des jeunes sur les méfaits de l’immigration clandestine, une soirée artistique. Mais aussi une lucarne d’échanges pour parler de la région, à travers trois panels sur les thèmes, «Les variantes linguistiques en pays Wê», «Glaa, l’art vivant de la spiritualité Wê», «La performance linguistique comme porte d’entrée à l’âme culturelle des peuples de l’oralité, l’exemple du peuple Wê».
Source: Agence Ivoirienne de Presse