Ivory Coast Times

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Côte d’Ivoire-AIP/ Pré-collecte d’ordures ménagères : Sami Philomène, fierté d’une éboueuse en proie à des difficultés (Reportage)

La collecte des ordures ménagères, un métier autrefois dévolu aux hommes, est de nos jours pratiqué par la gente féminine qui arrive à s’assumer et tirer sa pitance quotidienne malgré la dureté et ‘’la laideur’’ de l’activité.

Ce travail est mal vu et ingrat tant les préjugés fusent de partout surtout quand c’est une dame qui s’y adonne.

Mais pour rien au monde, Sami Philomène ne voudrait se retrouver confinée entre les critiques, de sorte à tout laisser tomber, à ne rien faire et compter sur une quelconque aide.

La cinquantaine révolue, dame Sami, originaire de Danané, vit seule au quartier Gbêpleu de Man. Elle est mère de six enfants dont trois filles et trois garçons.

Chaque matin, au lever du soleil, Sami Philomène, sort de son quartier Gbêpleu où elle loue une chambre et va vaquer à ses occupations, celles de ramassage d’ordures ménagères de concessions en concessions.

Drapée dans un pantalon kaki avec bottes aux pieds, et vêtue d’un tee-shirt orange avec foulard noué sur la tête, l’éboueuse enfourche comme d’accoutumé son engin, un tricycle capricieux qui refuse d’obéir à son maître, tant, l’effet du temps a fini par avoir raison de lui.

Ce matin encore, de tentatives en tentatives, ‘’le tacot’’ finit par vrombir et le voilà embarquée dans les ruelles de Gbêpleu et du quartier Domoraud pour assurer sa pitance quotidienne.

Un travail pénible, mal vu et dangereux

Pour cette femme qui se bat pour obtenir son gagne-pain, le repos se révèle un luxe.

« Avant je sortais à 4 h du matin, mais les gens m’ont dit que ce n’est pas à cette heure qu’une femme doit sortir. Donc maintenant, je sors à 8 h parfois 9 h et je rentre à 12 h », a indiqué dame Sami.

Elles travaillent six jours sur sept dans la semaine et ne peut se permettre le repos que la ronde journalière accomplie en faisant le tour complet des domiciles qui ont contracté avec elle. « Je travaille dans trois quartiers, Gbêpleu, Domoraud et puis Campus », précise-t-elle.

Elle est connue des habitants qui l’appelle affectueusement pour certains, « la vieille mère » au passage de son engin qui laisse échapper derrière lui, des grincements qui en disent long sur son état défectueux. Une fois son tricycle est plein, elle se rend aussitôt à la décharge de Zélé à environ trois kilomètres de la ville de Man pour jeter les ordures.

Cependant, les préjugés, les difficultés et risques liés au travail ne manquent pas.

Sami Philomène reconnaît que le travail de ramassage d’ordures n’est pas chose aisée avec toute la puanteur que dégage les immondices et le regard de la société vis-à-vis de la femme exerçant le métier d’éboueur. Mais de son expérience, elle croit que les appréhensions et les effluves permanents que dégage sa charrette à ordures sont un moindre mal quand on les compare aux dangers associés au boulot. Ces dangers qui ont pour noms, tessons de verres ou bouteilles qui peuvent blesser, charges trop lourdes, maux de dos et risques de chutes font partie des menaces quotidiennes.

« Je suis tombée sur moto là, c’était bien chargée avec poubelle donc mon côté-là est déplacé jusqu’ici (…) », a-t-elle expliqué, montrant son côté endolori.

« Depuis ce jour-là, la moto a pris un coup, un peu de chose, j’envoie çà au garage », a-t-elle ajouté, indiquant que la défection de son engin et sa santé après l’accident qui l’ont éloignée du boulot, lui ont fait perdre une bonne partie de ses clients et mis à mal son business.

« Depuis j’ai fait l’accident, je ne me suis jamais retrouvée dans ma vie (…) il y a des jours je n’ai même pas 5 francs », a révélé la quinquagénaire, la gorge nouée.

Malgré tout, elle s’adonne pleinement sans protections sanitaires, parfois sans outils ou matériels adéquats.

Un boulot ingrat…

Malgré le travail qu’elle abat pour débarrasser les domiciles de leurs ordures, dame Sami avoue être parfois découragée par l’attitude des personnes.

« Il y a des clients qui me donnent courage, et il y en a qui ne me donnent même pas le courage (…). Aujourd’hui, j’ai même abandonné beaucoup », a-t-elle signifié

Du manque de courtoisie, parfois au dédain des gens, l’éboueuse se laisse aller jusqu’à se convaincre que, peut-être, que Dieu ne lui a pas accordée la chance dans sa vie.

Aujourd’hui, avec la réduction drastique du nombre de ses clients liée aux pannes récurrentes de sa moto, qui ne lui permettent pas d’assurer constamment l’enlèvement des ordures, l’éboueuse dit joindre difficilement les deux bouts.

Un revenu en deçà des espérances

Par mois, chaque concession abonnée à ses services lui verse la somme de 1000 francs. « Normalement quand j’avais beaucoup de clients, je pouvais m’en sortir avec 80 000 F ou 100 000 F comme ça », a-t-elle fait savoir. Malheureusement les charges d’entretien du tricycle réduisent les efforts de cette brave dame qui affirme se retrouver souvent avec 20 000 ou 25 000 francs le mois.

Appel pour acquisition d’un nouveau tricycle et relancer son business

Malgré ses déboires avec sa moto et le manque de courtoisie de la part de certaines personnes, Sami Philomène n’entend point baisser les bras et compte s’investir pleinement dans l’activité d’enlèvement des ordures ménagères. Le faire, c’est trouver son gagne-pain, mais aussi aider la mairie à évacuer les immondices de la ville.

« Je demande au président Alassane Ouattara de venir m’aider. Tous mes frères et sœurs venez m’aider. Je demande la même moto, je n’ai pas de matériel pour travailler. J’ai vraiment besoin de la moto et aussi parce que le travail que fait la mairie, il lui est impossible de rentrer partout, ce que nous autres on comble d’ailleurs très bien », a plaidé la quinquagénaire qui a entrepris le ramassage des ordures, il y a maintenant près de trois ans avec à l’entame, une brouette.

Source: Agence Ivoirienne de Presse