Ivory Coast Times

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Côte d’Ivoire-AIP/ Le CERFAM veut faire de l’enrichissement des aliments une stratégie optimale pour éradiquer la ” faim cachée ” (Interview)

Le gouvernement ivoirien et le PAM, à travers le CERFAM, en collaboration avec la Commission de l’Union africaine et l’Organisation ouest-africaine de la santé (OOAS), ont lancé une consultation virtuelle de haut niveau jeudi 02 et vendredi 03 septembre 2021, sur le thème “L’enrichissement des aliments : quelle approche alimentaire pour réduire les carences en micronutriments en Afrique ?”.

La consultation visait à favoriser l’échange d’expériences et de bonnes pratiques en matière d’enrichissement des aliments afin d’accélérer la lutte contre la malnutrition sous toutes ses formes en Afrique. Le directeur par intérim du Centre d’excellence régional contre la faim et la malnutrition (CERFAM), Patrick Teixeira, à l’issue de ces assises virtuelles, s’est prêté aux questions de l’AIP. Son vœu, « c’est de faire de l’enrichissement alimentaire vraiment une stratégie optimale qui puisse marcher avec les autres interventions complémentaires afin d’éradiquer non seulement ce qu’on appelle la faim cachée qui sont les carences en micro-nutriments mais aussi combattre toutes les formes de malnutrition ».

Deux jours de consultation de haut niveau sur l’enrichissement de l’aliment en Afrique, que peut-on retenir ?

Ces deux jours ont été extrêmement importants. Ils ont montré que quand la volonté politique est là, l’engagement de tous les partenaires, on peut se réunir autour d’une consultation de haut niveau qui amène des organisations qui justement peuvent faire bouger les choses, comme l’Union africaine, l’organisation Ouest-africaine de la santé, le programma alimentaire mondial, comme les partenaires techniques et financiers, la société civile, le secteur privé, les institutions financières, les universités, les chercheurs et aussi beaucoup de consommateurs qui veulent en savoir un peu plus sur l’enrichissement des aliments.

Et ces deux jours ont été extrêmement riches en échanges, en partage d’expériences. J’ai pris beaucoup de plaisir à avoir la mobilisation, l’engagement, le positionnement de tous pour faire de cette consultation justement un espace d’échanges, de partages d’expériences où on pouvait voir les bonnes pratiques des pays, des uns et des autres, donc apprendre, c’est très important. Voir ce qui marche et puis surtout, aussi s’entendre sur ce qu’il y a à faire. Parce que cela fait un moment qu’on parle d’enrichissement alimentaire mais pourquoi cela ne va pas assez vite.

Tout le monde s’accorde pour dire que l’enrichissement des aliments c’est une des méthodes les plus efficaces, les plus effectives justement pour mettre fin aux carences en micronutriment et pourtant les avancées ne se font pas assez vite. Nous espérons qu’au sortir de ces deux jours que toutes les parient prenantes sous le leadership de l’Union africaine avec le support décisif du gouvernement de la Côte d’Ivoire, du PAM, à travers le CERFAM, pourront justement mettre en œuvre des recommandations, un plan d’action tangible, durable qui puisse permettre d’atteindre les objectifs escomptés.

Vous avez parlé de carences en micro-aliments, pour le citoyen lambda, c’est quoi une carence en micro-aliment ?

Très souvent on a tendance à manger, on mange surtout les aliments de base qu’on connaît, le riz, l’attiéké, le manioc et autre, la viande. On n’oublie que, pour le fonctionnement de l’organisme, il est essentiel d’avoir des micro-nutriments, donc qui sont les vitamines, les minéraux, comme on dit le fer, l’iode, etc., dont le corps a absolument besoin, pour bien fonctionner, dont les fonctions essentielles, intellectuelles, physiques, biologiques de l’organisme, sont nécessaires pour faire en sorte qu’on puisse tirer le plein potentiel des êtres vivants. Pour ce faire, les carences en micro-nutriments ont un coût extrêmement élevé parce que, si on ne fait rien, par exemple comme l’anémie, évidemment, il y a un manque à gagner de productivité, il y a des coûts pour la santé publique, il y a des coûts en termes de gain et d’apprentissage. Il est essentiel d’y mettre fin et pour le faire, il existe un éventail de solutions.

Une première solution, c’est la diversification alimentaire. Il faut manger plus varié et plus riche et plus sain. Un deuxième axe stratégique, c’est la supplémentation. Très souvent on prend ici et là, des médicaments. Mais là l’enrichissement alimentaire se fait un peu de façon naturelle parce que on n’a pas besoin de changer nos habitudes. Je vais vous donner un exemple très simple : si vous utilisez le riz enrichi, mais vous mangez toujours le riz. Il a le même goût, il a la même couleur mais en plus, il a ces micro-nutriments essentiels, donc ces vitamines, ce fer acide folique, qui va permettre justement au corps d’en tirer plein bénéfice.

Quand on parle de fortification, on a tendance à penser à du chimique, à de l’engrais, à quand intégralement le bio ?

Cela existe déjà. La bio-fortification est à un stade très avancé. Durant les deux jours de consultation, nous avons pu voir qu’effectivement, des avancées ont été faites. Alors, il ne s’agit pas de fortification chimique comme on dit, mais justement, profiter de ce qu’à la technologie à offrir. Et l’innovation à offrir, c’est faire en sorte que nous ayons des semences qui soient beaucoup plus riches, beaucoup plus résistantes à certaines pestes. Donc, qu’on puisse tirer le meilleur profit en apportant plus de micro-nutriments.

Cela existe déjà et il y a des avancées qui ont été faites. Comment faire déjà justement pour qu’on puisse développer ces initiatives avec les financements qu’il faut, avec le support politique, avec les orientations stratégiques de toutes les parties prenantes, faire en sorte que cela puisse avoir, on va dire, une zone de couverture beaucoup plus large mais aussi, sensibiliser les consommateurs à justement, accepter ces aliments qui leur apportent ces micro-nutriments qui sont essentiels.

Quand on parle d’aliments, on parle aussi de la boisson (bière, soda, liqueurs), est ce que le CERFAM adresse également cet aspect ?

On va dire que quand nous parlons des aliments effectivement on les voit dans leurs diversités. Vous savez que pour avoir une alimentation saine et équilibrée, nous conseillons vraiment, de ne pas, en tout cas abuser de toutes ces boissons qui très souvent ont beaucoup trop de sucre ou encore ont d’autres substances qui créent une addiction, et aussi qui peuvent être nuisibles à la santé. Mais beaucoup d’institutions, je veux dire le ministère de la santé, ces institutions qui justement lutte contre toutes ces addictions et autres maux, sont beaucoup mieux placées pour non seulement parler de leurs stratégies mais des initiatives concrètes qu’elles mettent sur le terrain.

Mais ce que je peux vous dire, c’est que le CERFAM est résolument engagé à travailler avec toutes les parties prenantes, pour trouver ce qui marche. Alors il y a des bonnes pratiques partout, comment on peut prendre là où ça marche, on identifie et on dissimile. On n’a pas besoin de réinventer la roue comme on dit, est-ce qu’on peut répliquer ce qui marche ailleurs, et le faire ici et dans les autres pays et comment on peut aussi mettre à l‘échelle, pour en faire justement des politiques, des interventions de masse qui touchent le plus grand nombre.

Source: Agence Ivoirienne de Presse