Ivory Coast Times

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AIP/ “Lunne by Jade and Bibie”, une serviette hygiénique made in Côte d’Ivoire, réutilisable, saine, économique et écologique (Feature)

Des femmes ont mis au point en Côte d’Ivoire, une serviette hygiénique lavable et réutilisable (SHL) jugée plus saine, économique et écologique. Fruit d’une volonté de retour aux sources, mais aussi d’un engagement écologique.

Une solution qui réhabilite la serviette traditionnelle

Deux amies de faculté, Josiane Yao et Abiba N’Guessan, éprises des questions environnementales et sociales, ont conçu pour les femmes, des serviettes hygiéniques et des culottes menstruelles lavables et réutilisables, sous la marque Lunne by Jade and Bibie.

Josiane Yao avoue, lors du lancement de cette trouvaille, faire revenir les femmes, surtout l’Africaine, à la source. “Nos grands-mères et mères utilisaient des morceaux de pagne en guise de protection lors de leurs menstrues, et ne se plaignaient jamais d’odeur, d’inconfort ni d’affections intimes”, souligne-t-elle.

Elle insiste sur le fait que l’urbanisation ou encore l’acculturation a fait abonner certaines habitudes qui ont été à tort dépeintes comme mauvaises. La serviette lavable incarne la propreté de la femme qui d’ailleurs, avec ce type de protection, ne” jette pas son sang, une partie d’elle dans la nature”, ajoute-t-elle.

“Lunne by Jade et Bibie” respecte l’intimité de la femme, elle protège l’environnement et revêt aussi un aspect économique.

Face à la faiblesse des revenus de certains ménages et surtout des femmes habitant en zone rurale, elles proposent ces serviettes qui peuvent servir jusqu’à trois ans. La serviette lavable se veut à la fois pratique, écologique et économique.

Du point de vue écologique, Mme Yao attire l’attention sur le nombre de serviettes que chaque femme peut jeter en moyenne par mois.

Elle peut en décompter facilement une dizaine par femme par mois et donc fait remarquer l’importance de l’amas de déchets que constitue chaque femme par mois, et laisse imaginer le monticule de déchets à travers une simple multiplication par le nombre de femmes réglées dans une localité.

Les serviettes lavables épargnent ainsi de fomenter des déchets. Livrées avec un pochon de transport, elles sont aussi pratiques, affirme Mme Yao. Pour dame C.K, auxiliaire en pharmacie, les serviettes ou culottes jetables peuvent être utilisées par les femmes actives et surtout par les élèves et étudiantes.

Des protections pour maintenir la jeune fille à l’école

« La serviette lavable permet à la jeune fille d’être à l’école durant sa période menstruelle, sans risque de se tâcher et se concentrer sur ces études », relève Josiane Yao.

En effet, lors du Programme éducation et maintien de la jeune fille à l’école, zéro grosses en milieu scolaire organisé mercredi 09 novembre 2022 par l’association Mafubo, en collaboration avec son partenaire JSK Entreprise, au collège moderne de Grand Alépé, les responsables de cet établissement ont relevé des cas d’absentéisme des filles durant leur période menstruelle.

Certaines élèves, explique Mme Yao, manquent l’école parce que ne pouvant par s’acheter des serviettes hygiéniques (estimées à tort plus pratiques), préfèrent rester à la maison durant les deux à trois premiers jours de leurs menstrues où le flux est plus important. D’autres aussi restent chez elles, le temps “d’essuyer la honte” parce qu’elles ont laissé malencontreusement tomber leur morceau de pagne au sport ou se sont salies en classe.

A la suite d’une causerie – débat sur l’hygiène menstruelle et sexuelle avec les jeunes filles, une distribution de kits de serviettes hygiéniques lavables et réutilisables, respectueux de l’environnement, a été initiée au profit de 150 jeunes élèves et personnel féminin du collège.

Cette activité constitue une phase expérimentale de la sensibilisation à l’utilisation de la serviette lavable. Les initiatrices de “Jade et Bibie” espèrent continuer cette initiative avec le soutien et l’appui d’associations, d’organisations de la société civile ou étatiques engagées dans la promotion de la scolarisation de la jeune fille, ou spécialisées dans la recherche du bien-être et l’autonomie de la femme et aussi celles engagées dans la lutte pour la préservation de l’environnement.

Des critiques parfois rédhibitoires

“La serviette lavable est encombrante car elle nécessite d’être stockée avant de pouvoir être lavée”, fait remarquer une lycéenne présente à la présentation de “Lunne by Jade et Bibie”. Elle trouve bizarre de se promener avec une serviette sale dans son sac avant de le laver le soir, une fois à la maison.

Les SHL sont contraignantes car elles nécessitent plus de travail d’entretien que le simple fait de la jeter à la poubelle. La première critique étant le fait de rincer et laver son sang, recueilli dans une serviette.

Les serviettes lavables semblent plus chères au premier achat. Les femmes peuvent débourser une somme plus importante (1 000 FCFA l’unité) alors que le paquet de serviettes jetables est de l’ordre 500 FCFA pour les marques les plus répandues.

Des serviettes mal entretenues peuvent être sources de microbes et donc d’infections. Un médecin au Centre national de référence des staphylocoques des Hospices Civils de Lyon (France), professeur Gérard Lina, relève “les chocs toxiques” (irritation pouvant être dues à l’utilisation de serviettes hygiéniques) qui se développent la plupart du temps chez des jeunes filles de moins de 17 ans. Le problème peut provenir du manque d’éducation sur les conditions d’utilisation et d’hygiène.

En voyage ou en déplacement, il n’est pas toujours pratique de laver mais surtout de sécher discrètement ses SHL.

Des propriétés sanitaires, économiques et écologiques

Avec de meilleures compositions respectant les normes écologiques car en coton bio (en pagne wax pour “Lunne by Jade et Bibie”), le risque du “syndrome de choc toxique” est quasiment nul et permet d’éviter les irritations et allergies. Les serviettes hygiéniques lavables et culottes menstruelles semblent être les protections les plus sûres puisqu’à priori, elles ne contiendraient pas de produits chimiques, contrairement à des tampons et serviettes jetables.

Les serviettes réutilisables sont écologiques car lavables et donc réutilisables plusieurs fois.

Elles sont économiques car peuvent être utilisées entre trois et cinq ans, si bien sûr, bien entretenues, insiste Mme Yao. “Une seule serviette servira plusieurs années donc… c’est économiquement plus intéressant”, s’exclame-t-elle.

Quand on reproche à sa serviette de ne pas être très discrète lors du séchage, Josiane Yao rétorque qu’”elles peuvent être séchées là où les dessous féminins le sont discrètement”.

Pour qu’elles ne soient pas des vecteurs d’affections intimes, l’entrepreneure conseille aux femmes de bien les tremper dans de l’eau tiède et les laver au savon avant la première utilisation. “Il faut ensuite bien la laver après chaque utilisation et bien la ranger dans son pochon pour les prochaines fois”, recommande-t-elle.

Source: Agence Ivoirienne de Presse